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Patrick et la géographie de l’âme : 1950 kilomètres à vélo pour se retrouver

today23 septembre 2025

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Patrick et la géographie de l’âme : 1950 kilomètres à vélo pour se retrouver

Patrick Faure n’est pas venu vendre quelque chose. Il est venu offrir un bien plus rare : une inspiration. Une de celles qui s’infusent doucement, sans bruit, au son de sa voix calme et de son rire qui ponctue le récit d’une aventure que beaucoup qualifieraient de folle. Le 28 avril dernier, à l’aube de ses 70 ans, il a enfourché son vélo à La Réole avec une destination en tête : Venise. Sans entraînement spécifique, sans GPS, sans plan de route millimétré. Juste avec l’envie de faire les choses autrement.

L’idée a germé d’une frustration. Un précédent voyage dans la Sérénissime, accompli en avion, lui avait laissé un goût d’inachevé. « C’est très pratique l’avion », concède-t-il, « mais je me suis dit, la prochaine fois, ce sera pas en avion ». Derrière cette décision se cache une philosophie, une résistance douce à l’immédiateté de notre époque. Pourquoi survoler le monde quand on peut le traverser, le sentir, le mériter ?

L’aventure « à l’ancienne »

Son périple est une ode au « slow travel », une réappropriation du temps et de l’espace. 1950 kilomètres avalés en 26 jours, à une moyenne de 75 km quotidiens. Un itinéraire choisi non pour son efficacité, mais pour sa beauté : la vallée du Lot, les gorges de l’Ardèche, les Baronnies, puis l’ascension vers les Alpes.

Il le raconte sans emphase, presque avec une pointe d’étonnement amusé, comme s’il était le premier surpris par sa propre audace. Quand on lui demande s’il s’est entraîné, la réponse fuse, simple et directe : « Non ».

« L’entraînement, il se fait au fur et à mesure en fait, sur le chemin. »

Cette phrase résume tout. Le voyage n’est pas une performance à préparer, mais une expérience à vivre, où le corps et l’esprit s’adaptent jour après jour. Un retour aux sources, « à l’ancienne », où la seule technologie embarquée est la confiance. Confiance en ses jambes, en sa boussole intérieure et, surtout, en l’imprévu.

L’ascèse de la solitude

Partir seul sur une si longue distance est une confrontation. Avec la fatigue, bien sûr, mais surtout avec soi-même. Patrick nomme cette expérience une « ascèse ». Des journées entières sans autre compagnie que le bruit du vent et le petit vélo qui pédale dans la tête, chantant « des chansons à la con ou des cantiques d’enfant de chœur ».

Il y a eu des moments de doute, de découragement intense. Comme ce jour de pluie et de brouillard, perdu sur un col interminable des Alpes italiennes, où il s’est surpris à pleurer. Le moment où l’on se demande si l’on n’est pas « complètement dingue ». Mais c’est dans ces instants de vulnérabilité que la véritable force se révèle. Le point de bascule fut le sommet du col de l’Échelle, à 1700 mètres. L’Italie s’étendait à ses pieds. La décision était prise : « Si je décide de descendre, c’est pour aller jusqu’au bout ».

Ce voyage est un puissant rappel que les plus grands obstacles ne sont pas extérieurs.

« Si il nous arrive des galères, c’est parce qu’on s’y est mis soi-même dedans en fait. Ça ne vient jamais de l’extérieur. »

Le retour, véritable achèvement du voyage

Pour Patrick, l’aventure ne s’arrête pas à la destination. Le véritable accomplissement réside dans le retour. « Les vrais pèlerins, les pèlerins originels, ils faisaient le retour, et c’est pas rien de faire le retour ». Quitter la magie de Venise, les amis retrouvés, et reprendre la route dans l’autre sens est l’épreuve finale. C’est là que le voyage s’intègre, que la transformation s’ancre.

En partageant son histoire, Patrick ne nous dit pas de tous partir pour Venise à vélo. Il nous murmure quelque chose de plus essentiel : que l’aventure est à notre porte, qu’il suffit de décider de tourner la clé. Que le plus grand voyage est celui qui nous ramène, différent, à nous-mêmes.

Écrit par: Mathieu ROMAIN

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